breves europpeennes Christian Casper

L’Union européenne après la crise sanitaire, les plans de relance

 

Union européenne : Après la crise sanitaire…, les plans de relance de l’économie de l’Union

D’après la presse européenne

La pandémie de Covid-19 représente, pour l’économie de l’UE, un choc majeur aux conséquences socio-économiques très graves. Elles sont d’une ampleur qui varie selon les Etats membres et les secteurs économiques.

Malgré la rapidité avec laquelle les pouvoirs publics ont réagi en adoptant, au niveau national comme au niveau européen, un arsenal complet de mesures, l’économie de l’UE subira cette année une récession d’une ampleur historique : recul du PIB de l’ordre de 10% par rapport à celui de 2019 ; taux de chômage du même ordre de grandeur ; dette publique dépassant nettement les 100% du PIB dans plusieurs Etats membres.

Certains de ceux-ci (Italie, Espagne) ont été plus  touchés que d’autres, ce qui plaide en faveur d’aides différenciées dans une UE et une zone euro qui souffrent d’un manque aigu de convergence économique préjudiciable à la cohésion de l’ensemble.

Face à cette crise sanitaire, les Etats membres sont en première ligne. Ils ont agi selon leurs propres priorités et il n’est pas évident que les mesures prises aient été coordonnées avec les plans de relance européens.

Retenons que le gouvernement de coalition allemand CDU-SPD (la « Groko ») a été capable après deux jours d’âpres négociations, et à un an seulement des élections législatives, d’adopter début juin un nouveau plan de relance comprenant une baisse de ses deux taux de TVA. Du 1er juillet au 31 décembre 2020, ils passeront de 19% à 16% et de 7% à 5%. Cette baisse devrait avoir un impact immédiat et significatif sur la consommation des ménages.

Au niveau européen, la Commission s’est inspirée de la déclaration franco-allemande du 18 mai.  Le changement de position de l’Allemagne, qui a été jusque-là hostile à toute mutualisation, a été décisif. Elle a permis à la Commission d’innover de façon copernicienne en proposant le 27 mai un plan de relance de 750 milliards d’euros combinant aides (500 milliards) et prêts (250 milliards). Auparavant, la BCE avait adopté dès le mois de mars un plan de relance de 750 milliards d’euros et, juste après l’annonce de la proposition de la Commission, elle a annoncé le 4 juin qu’elle complétait son premier plan d’une somme de 600 milliards d’euros portant le total de ses interventions à 1350 milliards. L’inflation restant très sensiblement en dessous des 2%, elle a indiqué qu’elle maintiendrait des taux d’intérêt à 0% ou négatifs.

Ces plans européens ont-ils été élaborés en coordination ou en concurrence entre ces deux institutions européennes, l’une jouissant d’une indépendance que les traités lui ont donnée puisque sa seule obligation est de veiller à la stabilité des prix, l’autre devant composer avec le Conseil, le Parlement européen et parfois avec les parlements nationaux ? Outre que les sommes mobilisées par la BCE et la Commission ne sont pas comparables, l’efficacité de ces plans dépendra de la date de leur mise en œuvre et de leur durée. A ce jour, le premier plan d’urgence (Pandemic emergency purchase programme ou PEPP) de la BCE a déjà été consommé à hauteur de 235 milliards et, à ce rythme, il serait épuisé au mois d’octobre. Au même rythme, son deuxième plan, prévu pour durer jusqu’en juin 2021, aurait été épuisé en février et il n’est pas exclu qu’un troisième plan soit nécessaire.

Le plan proposé par la Commission doit, pour être finalisé et donc devenir opérationnel, suivre un parcours du combattant.

Ce plan, qui sera adossé au cadre financier pluriannuel (CFP 2021-2027) de 1100 milliards sur 7 ans qui est toujours en discussion, a été débattu par le Conseil européen le 19 juin (voir la note ci-dessous).

Il comprend deux innovations d’une grande portée :

– Le remboursement de la dette serait effectuée par des « dépenses budgétaires »  et non pas par des remboursements des Etats bénéficiaires. Il s’agirait d’une dette mutualisée ou commune. La Commission a prévu qu’elle ne serait remboursée qu’à partir de 2028 et que ce remboursement s’étalerait jusqu’en 2058.

– Les contributions nationales des Vingt-Sept ne seraient pas augmentées et les dépenses européennes ne seraient pas diminuées. La Commission propose d’augmenter les ressources propres de l’UE. Si cette proposition était adoptée cela signifierait « qu’une partie du budget européen ne dépendrait plus des Etats et que la Commission lèverait elle-même des impôts ».

On a donc pu, à juste titre, qualifier cette proposition combinant une dette commune et des impôts levés par la Commission de « moment hamiltonien. »

Il reste un obstacle de taille : le plafond des ressources propres, c’est-à-dire la contribution maximale des États membres au budget de l’UE, s’établit à 1,24 % du revenu national brut de l’Union européenne. Il est fixé dans la décision relative aux ressources propres, qui ne peut être modifiée qu’à l’unanimité et qui doit être ratifiée par les parlements nationaux. L’UE n’étant pas un Etat, les traités l’obligent à présenter un budget équilibré. Ces ratifications nationales sont donc nécessaires, sauf si les Vingt-sept et les parlements nationaux sont d’accord.

Pour l’avenir, on peut se poser deux questions et faire une remarque :

1- « L’UE d’après » reviendra-t-elle, après cette crise, « l’UE d’avant ?» Déjà mal en point, le pacte de stabilité et de croissance a explosé, les règles de concurrence concernant les aides d’Etat ont été suspendues et les frontières internes à l’UE ont été fermées puis rouvertes sans coordination entre les Etats membres.

2- Si la crise sanitaire a provoqué un incontestable sentiment de solidarité vis-à-vis des Etats membres les plus touchés, en sera-t-il de même si ces mêmes Etats, ou d’autres, connaissaient, comme en 2010-2012, (crise des dettes souveraines) de sérieuses difficultés économiques et financières?

La crise financière n’a pas fait disparaitre l’aléa moral.

3- Les écarts entre les niveaux d’endettement des Etats les plus aisés et de ceux qui ont des difficultés vont s’accroître ce qui, dans la durée, pourrait affecter l’indispensable convergence des économies de la zone euro.

Note :

Comme attendu, ce Conseil n’a pas été conclusif. Un autre Conseil européen sera convoqué en juillet en espérant qu’un accord sera obtenu avant la périodes estivale du mois d’août pour laisser suffisamment de temps à l’automne pour que les parlements nationaux et le Parlement européen puissent en débattre .

Les Vingt-sept devront surmonter d’importantes divergences : le montant du plan et sa durée, l’équilibre entre prêts et subventions, les critères de répartition des aides, ainsi que la délicate question des ressources propres. Seule, et c’est un acquis de taille, la mutualisation d’une partie des dettes n’est pas contestée.

 Le Conseil européen débattra sur le budget et les plans de relance les 17-18 juillet.

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