Chroniques de Christian Casper

La France exercera la présidence semestrielle du Conseil de l’Union européenne

Treize ans après sa dernière présidence du Conseil en 2008, la France l’exercera à nouveau, du 1er janvier au 30 juin prochains. Quel est le rôle de cette présidence tournante et que peut-on en attendre, dans le contexte actuel ?

I – Quel est le rôle de la présidence du Conseil de l’Union ?

La présidence du Conseil de l’Union échoit à chaque État membre qui, à tour de rôle selon un ordre préétabli, exerce cette fonction pendant 6 mois, de janvier à juin ou de juillet à décembre. Le calendrier complet des présidences du Conseil a été fixé jusqu’en 2030.

Depuis le Traité de Lisbonne de 2007, chaque Etat membre l’exerce en collaboration avec deux autres pays. Ce système, dit de « trio », permet de définir les grands thèmes qui seront traités pendant une période de 18 mois. La France travaillera en « trio » avec la République tchèque et la Suède qui lui succéderont.

La présidence du Conseil de l’Union est chargée d’organiser et de présider l’ensemble des réunions des Conseils des ministres, par domaine d’activité. Ce sera, par exemple le ministre français de l’agriculture qui présidera le Conseil Agriculture.

Toutefois, c’est le Haut représentant de l’Union pour les Affaires étrangères et la politique de sécurité, actuellement l’Espagnol Josep Borrell, qui préside le Conseil Affaires étrangères.

D’autre part, la présidence du Conseil européen n’est plus exercée par la présidence tournante mais par le Belge Charles Michel élu le 1er décembre 2019 pour une période renouvelable de deux ans et demi.

Parmi les trois pays de ce « trio », la France est à la fois un « grand pays », un pays fondateur de l’Union et un membre de la zone euro. Ce statut confère à la France une responsabilité particulière vis-à-vis de ses partenaires et de l’opinion publique, comme cela a été le cas pour la présidence allemande qui a mis en place le plan de relance européen au second semestre 2020.

II- Quelles responsabilités pour la France ?

Le programme détaillé de la présidence française du Conseil de l’Union pourrait être dévoilé lors du Conseil européen de décembre (16-17) et sera officiellement présenté par le Président Emmanuel Macron dans son adresse aux eurodéputés réunis en session plénière à Strasbourg le 19 janvier 2022.

1- « Business as usual » ou le suivi de l’agenda législatif européen

La France devra s’acquitter de plusieurs missions. Elle devra suivre l’agenda législatif européen déjà sur la table des institutions et élaborer des compromis susceptibles de résoudre les problèmes politiques entre les gouvernements des 27 États membres ou entre les gouvernements et le Parlement européen.

Parmi les dossiers de l’agenda, certains sont assez mûrs pour faire l’objet d’un accord institutionnel. C’est le cas des deux réformes majeures du marché numérique européen, le Digital Market Act (DMA) et le Digital Services Act (DSA). Les négociations sont assez avancées pour qu’elles puissent être adoptées au cours du premier semestre 2022.

2- Un rôle « d’impulsion ».

a) Moins de deux ans après le début de la crise de la Covid en Europe et alors que celle-ci connait un regain, la France devra tenter de former des consensus entre les États membres afin de poursuivre le mouvement de reconstruction de l’économie européenne. 

A cet effet, le premier enjeu des six mois de sa présidence sera le suivi de la mise en place du plan de relance européen, dont les premiers versements sont déjà venus alimenter les plans nationaux, ainsi que la concrétisation des nouvelles ressources propres de l’Union européenne qui doivent permettre de rembourser l’emprunt européen. Des discussions pourraient également avoir lieu autour d’un élargissement de ce plan de relance ainsi que sur la réforme des critères de Maastricht sur la dette et le déficit, critères qui ont été suspendus par la Commission jusqu’à la fin de 2022.

Le calendrier législatif prévoit notamment la mise en place du mécanisme d’ajustement carbone aux frontières pour début 2023, tandis que des discussions pourraient se poursuivre autour de la fiscalité des géants du numérique (GAFA).

Côté climat, la France devra suivra la mise en place des différents éléments du Pacte vert pour l’Union, dont la plupart des textes législatifs doivent être présentés d’ici à l’été 2022. En outre, le relèvement des objectifs de réduction des gaz à effet de serre ou encore l’extension du marché carbone devraient figurer à son agenda.

Enfin, la France, première puissance agricole du continent, devra suivre la mise en place de la nouvelle PAC prévue pour le 1er janvier 2023. Une réforme d’ampleur, surtout par ses volets sur la conditionnalité environnementale ou la souveraineté alimentaire.

b) Pendant cette présidence,« l’autonomie stratégique de l’Union ou l’Europe souveraine » sera la grande affaire de la France et de son Président qui s’est beaucoup exprimé sur ce sujet depuis son discours à la Sorbonne (2017). Si elle est, en premier lieu, liée aux questions de défense, elle les dépasse dans la mesure où l’Union cherche à réduire sa dépendance dans d’autres secteurs. C’est notamment le cas du numérique, de l’intelligence artificielle, de l’industrie de l’espace.

Dans un document récent, la Commission a, en la personne de Josep Borrell, exposé sa « boussole stratégique » sur les orientations stratégiques de la politique de sécurité et de défense commune de l’Union.

c) Cette présidence de la France s’exercera sous le regard des Français appelés à élire leur Président(e) de la République les 10 et 24 avril. Elle sera l’un des éléments parmi lesquels ils jugeront le Président sortant s’il se présente à sa succession.

Cette présidence sera d’autre part limitée dans le temps puisqu’un devoir de réserve devra être observé un mois avant cette échéance.

Christian Casper,
Novembre 202
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